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12 Jan. 2015 / Editorial

La médecine générale, un métier dont on ne se lasse pas

Elisabeth Griot, Olivier Kandel, Yann Thomas Desessarts

Bientôt le médecin travaillera au-delà de 65 ans. Alors que l’âge de la retraite est progressivement repoussé, la question de la lassitude au travail sera de plus en plus un argument de choix professionnel. La spécialisation du travail est sans cesse croissante depuis la deuxième partie du 20e siècle, pour augmenter la productivité. Mais elle trouve depuis quelques années ses limites, notamment par l’usure dans le temps et la monotonie des tâches. L’analyse des données de l’Observatoire de la Médecine Générale sur 10 ans montre que la prévalence des PROBLEMES PROFESSIONNELS a été multipliée par 3 entre 2000 et 2009.

La médecine, qui depuis une trentaine d’années ne cesse de s’hyperspécialiser, n’échappe pas au phénomène. Sont apparus, le rythmologue, l’hypertensiologue, l’épileptologue, même les internistes ont vu naître le diabétologue… Après le sexologue, viendrait d’apparaître l’acouphènologue. On imagine la lassitude probable de nos confrères qui s’occupent d’une seule maladie pendant plus de 30 ans. Ceci explique peut être leur sensibilité aux effets de mode.

Le médecin généraliste lui, rencontre plus de 150 problèmes de santé différents en une année. Les 30 pathologies les plus fréquentes représentent 50% de son activité. Par ailleurs, en consultation, le généraliste prend en charge en moyenne 2,2 problèmes de santé. Sa discipline est sans aucun doute la plus diversifiée :
- Lorsque le patient passe la porte de son bureau, minute de suspense, le médecin ne sait pas la plupart du temps, le trouble que celui-ci vient lui offrir.
- L’absence de plateau technique accessible pendant la consultation, impose au praticien l’usage d’un sens clinique élaboré couplé à une démarche intellectuelle.
- Le médecin traitant est amené à cheminer aux côtés du patient, dans une histoire intime, partagée, tenant compte de l’altérité. Il connaît le grognon, le toujours souriant, le bavard, le taiseux… cet autre qu’il rencontre sans toujours percevoir son insidieuse proximité.
- La médecine générale est un merveilleux poste d’observation de la nature humaine et des fonctionnements sociaux. Le généraliste doit s’adapter. Il suit l’enfant, l’adulte et la personne âgée, de culture et d’expression différentes. Il tient compte des représentations individuelles et collectives de la maladie et de la santé.

D’aucun soulignerait un peu rapidement que le généraliste certes, voit beaucoup de pathologie et n’est pas enfermé dans un regard monomaniaque d’un organe ou d’une maladie, mais qu’il est limité à la bobologie, aux maladies pas graves. Il n’en est rien, puisque placé à l’entrée du système de soin il faudra au praticien différencier le banal du potentiellement grave. Sachons que la démarche du médecin est bien plus complexe devant une épigastralgie, aux étiologies incertaines, que devant un ulcère gastrique ou même un cancer de l’estomac, au protocole très précis.

La complexité qui est aussi la valeur ajoutée de la médecine générale est de prendre en charge des malades plus que des maladies, au carrefour des sciences et de l’humanisme.

Les étudiants ne savent pas assez la diversité de notre travail, comment il est varié, inattendu et passionnant. Les maîtres de stage devraient en prendre conscience et veiller à bien le présenter aux externes et aux internes qui passent dans nos cabinets.


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